Le principal effet indésirable de la PDT est la douleur, souvent décrite par les patients comme une sensation de brûlure. Elle est intense dans près d’un tiers des cas avec une EVA ≥ 6/10. La douleur commence rapidement après le début de l’illumination, atteint son paroxysme en quelques minutes, et peut persister plusieurs heures après son interruption. Les mécanismes impliqués ne sont pas complètement élucidés à ce jour.
La douleur semble être plus importante pour les kératoses actiniques, les lésions céphaliques et les surfaces cutanées étendues. Le traitement des champs de cancérisation du scalp doit donc être l’objet d’une attention particulière.
De nombreuses stratégies de prise en charge antalgique ont été étudiées et répertoriées dans plusieurs revues systématiques. Mon analyse va porter sur l’article «PDT and pain: a systematic review» parue dans Photodiagnosis and Photodynamic Therapy en 2017 et menée notamment par Zeitouni et al. L’objectif de cette étude est de passer en revue et d’évaluer l’efficacité des différentes interventions visant à améliorer la douleur associée au traitement par PDT. Au total, 48 articles ont été retenus et les méthodes ont été séparées en 2 parties. (1)
Partie I : Les traitements pharmacologiques ou physiques de la douleur, sans modification des paramètres de traitement
a) Les procédures invasives
4 études portaient sur les blocs nerveux. Il était observé une réduction moyenne d’EVA de 5,4 à 6,2 points selon les études. En comparaison à une analgésie par air froid, la réduction moyenne d’EVA était de 4,2 points.
Les antalgiques systémiques par voie orale ou par voie veineuse s’avèrent significativement moins efficaces que les blocs nerveux et n’étaient pas plus efficaces que l’insufflation d’air froid. Cela s’expliquant probablement par le mécanisme de la douleur par action sur les fibres nerveuses.
b) Les procédures non-invasives
On retiendra les techniques de brumisation d’eau fraiche et d’insufflation d’air froid, qui n’altèrent pas l’efficacité du traitement et sont facilement utilisables en pratique clinique. L’amélioration de l’EVA était significative mais modeste pour ces techniques, de l’ordre respectivement de 1,3 point à 1 point.
L’application d’anesthésiques ou antalgiques topiques (gels de tetracaïne, licocaïne et prilocaïne, gel de morphine) ne permettait pas d’amélioration significative de la douleur.
L’hypnose a fait l’objet de peu d’études concernant la gestion de la douleur au cours de la PDT. Cette technique n’a donc pas été inclue dans la revue, mais certains centres l’utilisent notamment pour la prise en charge de lésions génitales.
Partie II : l’impact des modifications des paramètres de la PDT sur la douleur
a) Les différents précurseurs
Plusieurs études laissent penser que l’ALA serait plus douloureux que le MAL. Ces résultats ne sont cependant pas toujours significatifs et nous pouvons remarquer que pour certaines études le temps d’incubation pour l’ALA était 1 à 3 h plus long que pour le MAL. Il semble donc logique d’observer des scores de douleurs plus importants puisqu’un pic de PpIX plus important est atteint. Il n’était pas retrouvé de différence entre un traitement utilisant le MAL et une nanoémulsion d’ALA.
b) Les paramètres d’illumination
Des protocoles de traitement à 2 paliers d’irradiance ont été étudiés par plusieurs équipes avec une excellente efficacité et une très bonne tolérance. Le principe est de débuter le traitement à basse irradiance pour dégrader une grande partie de la PpIX accumulée, puis de reprendre le traitement à haute irradiance. Dans une des études de Zeitouni, l’EVA rapportée était de l’ordre de 1 avec cette méthode en 2 paliers (30 mW/cm2 puis 150 mW/cm2). Cette méthode n’est à ce jour pas validée ni standardisée.
Une réduction significative de la douleur (4 points d’EVA) était rapportée lorsque l’illumination était menée à basse irradiance sur une plus longue période (irradiance 7 mW/cm2, fluence 75 J/cm2) en comparaison à un traitement à haute irradiance sur une plus courte période (irradiance 80 mW/cm2, fluence 75 J/cm2). L’efficacité du traitement n’est pas altérée par une illumination à irradiance plus faible dans plusieurs études.
La PDT en lumière du jour utilise ce principe, ainsi que celui de débuter le traitement après une courte période d’incubation, permettant de traiter à un faible niveau de PpIX qui est produite et dégradée en continu pendant le traitement. Cette modalité d’illumination permet de diminuer les scores de douleur de l’ordre de 5 points d’EVA, voire d’assurer un traitement sans douleur pour certains auteurs.
Avec les limites de la PDT en lumière du jour que nous connaissons, de nouveaux dispositifs de lumière blanche artificielle par exemple, ont été étudiés, permettant une efficacité et une tolérance similaire à la PDT en lumière du jour. Ce mode de traitement requiert une illumination plus longue, et donc une pièce dédiée, ce qui peut être limitant pour certains cabinets.
Pour conclure
L’utilisation de procédures invasives pour la gestion de la douleur ne paraît, en 2021, plus d’actualité devant les données dont nous disposons désormais concernant l’impact des paramètres de traitement sur la douleur.
Pour réduire la douleur, il est préférable de débuter l’illumination après un temps plus court d’incubation du précurseur et d’illuminer à faible irradiance pendant une durée plus longue. L’efficacité ne s’en trouve pas altérée. Ces modalités sont d’ailleurs récemment au premier plan pour le traitement des kératoses actiniques avec l’utilisation de la PDT en lumière du jour ou de nouveaux dispositifs comme la lumière du jour artificielle ou les textiles lumineux.*
Et vous, quel est votre retour d’expérience ? En quoi vos pratiques concernant la gestion de la douleur ont évolué ?
N’hésitez pas à nous décrire les paramètres de traitement utilisés lorsque vous enverrez vos cas cliniques pour l’iconothèque. Au plaisir de vous lire !
*Vérifier les indications et les stratégies thérapeutiques des produits avant toute prescription
ALA : acide aminolévulinique
EVA : échelle d’évaluation analogique
MAL : aminolévulinate de méthyl
PDT : photothérapie dynamique
PpIX : protoporphyrine
Bibliographie
Ang JM et al. Photodynamic therapy and pain: A systematic review. Photodiagnosis and Photodynamic Therapy. 2017;19:308-44
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